Vendue à l’actionnaire américain pour 1000 €, la marque était censée justifier la mise en place d’une ponction de près de 25.000.000 € annuels !
Par un acte du 19/12/2003, le Président de Manpower France vendait à l’actionnaire américain une quinzaine de marques propriétés de Manpower France dont la marque Manpower, pour la somme de 1000 €. Simultanément, était justifiée par cette vente la mise en place d’une redevance s’imputant dans les charges de l’entreprise, dont l’expérience a montré qu’elle s’éleve à près de 25.000.000 € annuels [1].
Pourquoi la CFTC est intervenue, en défense de la participation des salariés
Alors qu’il se mettait en place, le système de redevance fut dénoncé par les représentants CFTC. De par ses conditions de mise en place scandaleuses, la CFTC a considéré que son impact sur le bénéfice fiscal de l’entreprise était inacceptable :
- l’employeur s’attaquait à la participation aux bénéfices des salariés intérimaires et permanents,
- tout en portant également atteinte à l’impôt sur les sociétés, donc à l’intérêt général [2].
Devant l’inaction du CCE [3], les représentants CFTC ont en conséquence décidé d’agir par eux-mêmes :
- d’abord pris langue sur le sujet avec le Président de l’époque, en insistant à nouveau lorsque s’est manifesté de surcroit une volonté de la direction de réduire les effectifs salariés en mettant en œuvre un Plan de Sauvegarde de l’Emploi (PSE)... pour rétablir la rentabilité ! mais en vain ;
- puis se sont adressés aux commissaires aux comptes de l’entreprise, par courrier du 07/01/2006, également en vain ;
- enfin au Procureur de la République de Paris par courrier du 04/03/2006, avec lequel les représentants CFTC furent ensuite en contact, ainsi qu’avec la Brigade Financière.
Ce n’est qu’après ces démarches entreprises par la CFTC, que le CCE a alors enfin poursuivi l’analyse des conséquences néfastes pour l’entreprise et les salariés de la mise en place de cette redevance de marque.
Suite aux contacts avec la CFTC, si le parquet n’entama aucune procédure pénale, le corps judiciaire eut néanmoins des contacts avec l’administration fiscale de la Division des Vérifications Nationales et Internationales (DVNI), aboutissant à de conséquents redressements fiscaux :
- 29.000.000 € de 2004 à 2007,
- 4.000.000 € de 2008 à 2011 (voir la Lettre A n°1584 du 14/03/2013 : http://www.lalettrea.fr/strategies-d-entreprise/2013/03/14/manpower-france-dans-l-%C5%93il-du-fisc,107949245-ARL),
soit 33.000.000 € en tout.
Du fait que la participation aux bénéfices est assise notamment sur le bénéfice fiscal, les salariés doivent comprendre que ces redressements fiscaux leurs sont paradoxalement favorables [4] !
La situation idéale serait néanmoins celle où l’entreprise Manpower paierait l’impôt sans avoir à être redressée, puisqu’à participation aux bénéfices équivalente, l’entreprise économiserait alors les pénalités.
Entêtement des dirigeants de Manpower : quand les salariés de Manpower France toucheront-ils leurs droits à participation au bénéfices ?
Que ce soit en matière fiscale, mais aussi sociale, URSAFF, concurrence, les exemples ne sont que trop nombreux et constants, qui démontrent que la gouvernance des dirigeants de Manpower France s’est jusqu’à présent fondée sur le déni et l’irresponsabilité.
Les victimes sont les personnes, l’ordre public, mais également l’entreprise même :
- des millions d’euros annuels de redressements URSSAF ;
- des dizaines de millions d’euros pour récidive de fraude à la concurrence, majorés spécifiquement pour Manpower France par les juges en comparaison des autres protagonistes, uniquement du fait de l’orgueil et du déni des dirigeants de l’époque ;
- ces dernières années de crise, Manpower France a été le seul grand du travail temporaire à avoir refusé ses obligations en matière de sauvegarde de l’emploi, avec pour conséquence un contexte psychosocial interne catastrophique.
Le sujet fiscal présent ne fait malheureusement pas exception, et les dirigeants Manpower avaient déjà largement démontré leur refus idéologique du partage de la valeur. Ils avaient par exemple tout simplement refusé de mettre en œuvre la Loi prime sur dividende, celle-ci ne prévoyant aucune sanction en cas de défaut de l’employeur.
De 2004 à 2008, ce sont 28.000.000 € d’arriérés potentiels de réserve de participation dont ont été privés les salariés Manpower. Toutefois, ceux-ci pourraient devoir :
- attendre l’issue du contentieux fiscal entamé par la direction en 2007,
- et s’enquérir d’une tentative d’éventuelle dissimulation de la dette salariale dans la holding (il existe une consolidation fiscale entre Manpower France et Manpower France Holding).
Si le contientieux doit suivre l’ensemble du parcours, à savoir le tribunal administratif, la Cour d’appel administrative, voir enfin le Conseil d’État, sa durée totale est de 10 ans environs !
Si ensuite l’employeur prétendait ne pas reconnaître l’impayé de participation en dépit du redressement, la CFTC serait alors attentive à mettre en place les moyens judiciaires complémentaires nécessaires, afin que les salariés intérimaires et permanents touchent les montants de participation aux bénéfices qui leurs sont dus. Mais si la CFTC tiendra au courant les salariés de ce dossier, elle les invite donc également à la patience...
Voir aussi :
- notre article postérieur sur l’exploitation-détournement du crédit d’impôt CICE en 2014 ;
- notre article postérieur sur la négociation annuelle 2014 sur les salaires, comparés aux profits, aux crédits d’impôt et aux plus-values de stock-options du dirigeant de la maison mère ;
- notre article antérieur sur le contentieux en cours mené par la CFTC contre l’employeur Manpower, visant au rétablissement du paiement de l’indemnité de congés payés aux salariés intérimaires ;
- notre article antérieur sur le constat par l’administration du travail des infractions de l’employeur Manpower France à la législation sur la sauvegarde de l’emploi, et le mettant en demeure ;
- notre article antérieur suite à la réponse du Ministre quant à la non application par Manpower de la Loi relative à la prime sur dividende, où la CFTC s’adresse alors aux groupes parlementaires de l’Assemblée Nationale, avec le courrier qui leur a été adressé le 14/04/2012 ;
- notre article antérieur sur les surprofits financiers de l’entreprise sur la période 2005-2010 ;
- notre article antérieur sur la confirmation de la condamnation de Manpower France pour fraude à la concurrence, le 10/01/2010 par la Cour d’Appel de Paris, puis le 29/03/2011 par la Cour de Cassation ;
- notre article de 2005 sur les prémisses de la restructuration juridique et financière de l’entreprise.