L’incapacité viscérale de la direction de l’entreprise Manpower à réfléchir économiquement le partage de la valeur, enfonce l’entreprise dans une spéculation financièrement pure et sans issue

Le Délégué Syndical Central CFTC Manpower a confirmé dans ces termes à la direction la non-signature de l’accord CET :

« Je confirme que nous ne sommes pas signataires d’un accord CET qui reste, là encore, très en deçà des attendus économiques mais en termes de partage de la valeur, dans le cas présent très en dessous des dispositifs existants dans la profession en termes d’avantage pour les salariés »

La priorité de la CFTC-Manpower est de garantir à tous les salariés, intérimaires comme permanents, une meilleure stabilité et sécurité financière, sans pour autant céder à la logique de l’employeur de vouloir transformer notre cœur de métier en placement de produits financiers, en plus de la pression pour forcer les intérimaires à ouvrir un CET.

La CFTC Manpower a fixé à 12% la demande de rémunération du CET, en rapport avec la rentabilité supérieure pour l’entreprise, ainsi que les pratiques d’autres entreprises de travail temporaire

Tout au long de la négociation, la CFTC-Manpower a affiché une ambition de rémunération du CET à 12%, en demandant à la direction de bien vouloir entrer dans une logique de calcul de rentabilité et de partage, sans se laisser entrainer à suivre aveuglément les pratiques de certains concurrents, tout en ignorant celles plus équilibrées dans le sens des salariés.

Pourquoi le taux de rémunération de 12% correspond à un juste partage de l’intérêt du CET avec les salariés, et comment la direction utilise-t-elle même le CET contre les primes variables des salariés permanents

Depuis 2015 et jusqu’en 2022, la direction a reversé 8% d’abondement aux intérimaires, quand en parallèle elle en gagnait tout autant sous forme d’allègement de cotisations patronales, d’intérêt de placement, de bénéfice à travers les provisions de charge et capital du CET, toutes sommes qui augmentent les capitaux propres de l’entreprise.

Mais depuis 2023, quand les sommes sont débloquées, les intérêts sont pris sur les comptes d’exploitation des agences. De ce fait, la direction invoque un déficit pour certaines agences. Mais en réalité, ce déficit artificiel n’est généré que sur les comptes d’exploitation des agences, puisque le CET apporte bien un profit global pour la société.

Dit autrement encore : du fait du mode d’injection du CET dans les comptes d’exploitation des agences, les salariés permanents eux-mêmes auraient plus de prime variable si le CET Manpower n’existait pas !

Alors avant d’ingurgiter comme argent comptant les mièvres complaintes de la direction, la CFTC Manpower avait demandé :

  • à sécuriser l’accord pour nos salariés intérimaires,
  • et de faire en sorte que l’entreprise reverse les intérêts dans le compte d’exploitation des agences s’agissant de l’impact pour les salariés permanents.

Harcèlement textos des intérimaires, forçage des placements, non rémunération potentielle des congés transférés sur le CET : les autres travers de l’accord CET

Par ailleurs, devant une telle martingale financière, la direction a refusé toute réduction du flux de textos vers les intérimaires, la CFTC en proposant un par mois au lieu du harcèlement systématique à chaque fin de contrat (plusieurs fois par semaine pour certains).

Enfin, excusez du peu, un des derniers gros points noirs de la négociation, c’est qu’il semble que la direction veuille se réserver de pouvoir ne pas rémunérer à 8% les congés qui seraient transférés sur le CET par les salariés intérimaires, sous prétexte que ces sommes soient destinées à être placées ensuite sur le Plan d’Epargne Retraite COLletif (PERCOL) négocié parallèlement. En effet, les salariés intérimaires pourront placer :

  • intérimaires en contrat de travail temporaire (CTT) : 20% de leurs Indemnité Compensatrice de Congés Payés (ICCP),
  • intérimaires en CDI (CDII) : cinq jours de congés (CP).

En acceptant un accord CET à durée indéterminée, les syndicats signataires ont fermé définitivement toute possibilité d’évolution moins défavorables et pénalisé jusqu’aux salariés permanents eux-mêmes

Dans le cadre des négociations sur le Compte Épargne Temps (CET), la CFTC Manpower avait alerté les autres négociateurs du risque d’un accord CET désormais non plus à durée déterminée, mais indéterminée, qui prive les salariés de toute possibilité de négociation sur le taux et les modalités d’abondement possibles.

L’accord CET intérimaire, dans sa forme, sera d’ailleurs sur ce point également aussi néfaste pour les négociations annuelles sur les salaires des salariés permanents. Car hélas, chez Manpower pour gagner plus de droits on doit soit toucher à l’image de l’entreprise (par des grèves, des occupations médiatisées), soit toucher au porte-monnaie. L’échéance du précédent accord a permis de mettre la pression sur la direction pour les Négociations Annuelles Obligatoires sur les salaires (NAO) 2024 des salariés permanents, en les améliorant. Ce levier de négociation est désormais terminé.

Concernant l’impact négatif de l’accord pour les salariés permanents eux-mêmes, la direction Manpower a également refusé d’inscrire à l’accord l’absence d’objectifs indirects sur le CET donnés aux salariés permanents demandée par les représentants CFTC-intérim Manpower.

Tout bien pesé, un accord CET en défaveur des intérêts des salariés Manpower selon la CFTC, de surcroit défavorable à l’intérêt général par le pillage de la sécurité sociale qu’il représente

Outre les problèmes posés par l’accord CET ci-avant expliqués, la CFTC n’a pas non plus été incitée à signer du fait du pillage (légal) de 25 millions d’euros annuels d’exonérations de cotisations qu’il représente pour la sécurité sociale. Les gains financiers du CET non correctement partagés avec les salariés Manpower, leur sont en effet directement soustrait collectivement. Le CET permet en effet de différer d’énormes montants d’Indemnités de Fin de Mission (IFM) sur des mois non travaillés, ce qui optimise les exonérations de cotisations.

Depuis l’arrivée du Président Roumilhac, Manpower France a touché :

  • sur nos impôts, de 2013 jusqu’à 2018 : 786 millions d’euros de Crédit Impôt Compétitivité Emploi (CICE) dont seulement 70 millions ont été justifiés comme investissement (dont notamment des baux immobiliers à payer suite à fermeture d’agences, ce qui n’est pas spécialement de l’investissement) ;
  • sur notre sécurité sociale, de 2019 à 2021 : 647 millions d’euros d’exonérations de cotisations sociales.

Mais pourquoi aider à piller la sécurité sociale française, alors que les soins essentiels sont déremboursés et que nos hôpitaux sont consciencieusement détruits par les politiques gouvernementales françaises, si c’est pour dans le même temps n’organiser que des salaires indignes pour les salariés Manpower et des surprofits pour l’actionnaire américain ? Ce sont en effet en quelques années des milliards d’euros de dividendes Manpower France, de redevances de marques et autres transferts de charge (rétro-commissions aux États-Unis de contrats groupes - informatique, santé... - imposés aux filiales du groupe Manpower) qui remontent à l’actionnaire américain Manpower.
Depuis 2010 et pour les seuls dividendes, ce sont 1,155 milliards d’euros versés par Manpower France aux États-Unis, soit une moyenne de plus de 80 millions d’euros par an.

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