Dans un courrier du 21/06/2013, l’inspection du travail argumente un réquisitoire sévère contre la politique de contournement de la législation du travail mise en œuvre par l’employeur Manpower depuis plusieurs années pour restructurer le réseau d’agence, supprimer les salariés permanents, et maintenir les flux de profits financiers vers les États-Unis.
Ce que reproche l’administration à l’employeur Manpower
L’actuelle équipe dirigeante de l’entreprise paie aujourd’hui le lourd tribu laissé par la précédente, dont il lui incombe de solder l’héritage. Citant les témoignages des instances représentatives du personnel, l’administration liste les méthodes mises en œuvre par l’entreprise pour se dispenser de ses obligations envers les salariés permanents :
- Contraintes à la démission sur les salariés ;
- Mobilités imposées forçant à la démission ou au licenciement pour faute ;
- Ruptures conventionnelles ou organisation de fautes pour être licenciés, conséquences de la dégradation des conditions de travail ;
- Réorganisations permanentes ;
- Non application des obligations relatives à l’article L1233-46, soulignant que le caractère présenté comme naturel ou volontaire de la part du salarié ne dispense pas l’employeur de l’obligation de déclaration des suppressions de postes envisagées ;
- Non application des obligations relatives aux article L1233-61 et suivants relatives à la sauvegarde de l’emploi ;
- Mise en incapacité de l’administration d’exercer son obligation de contrôle des restructurations ;
- Absence d’information loyale et précise de la représentation collective du personnel de l’entreprise ;
- Rappel des délibérations de la représentation collective du personnel sur les manquements d’information et les entraves de l’employeur et, en dépit de ses propres déclarations relatives à la gravité de la position exprimée par la représentation du personnel, de la persistance de l’employeur à refuser ses obligations d’information et de consultation envers les CE et CCE.
Les demandes et les décisions de l’administration :
- Demande communication de la liste des établissements fermés, et des économies financières liées à la diminution de la masse salariale des postes non remplacés ;
- Intention de saisine du Procureur de la République de Nanterre par voie de procès-verbal pour absence de notification à l’administration d’un plan de sauvegarde de l’emploi conformément à l’article L1233-46 et réprimée pénalement par l’article L1238-4 du code du travail ;
- Relèvement de l’infraction d’entrave aux attributions du comité central d’entreprise définies par l’article L2327-2 et réprimée pénalement par l’article L2328-1 du code du travail ;
- Différentes injonctions procédurales visant les responsabilités pénales des dirigeants et de la personnalité morale Manpower France.
Elle en présente le mobile économique, constitué par la baisse importante du chiffre d’affaire et de l’emploi intérimaire, en relation à celle de l’activité intérimaire. Une situation à partir de laquelle l’employeur Manpower aurait dû viser à sauvegarder l’emploi. La CFTC dénonce depuis des années :
- Comment bien au contraire, l’employeur a consacré ses efforts à le détruire,
- Réservé dans le même temps les moyens de l’entreprise à la protection et la maximisation exclusive des flux financiers à destination de l’actionnaire américain.
La CFTC s’associe à la procédure en soutien à l’administration, en l’absence de dispositifs légaux de dialogue
Si la CFTC n’a jamais réclamé de plan de sauvegarde de l’emploi en tant que tel, elle a toujours souhaité que l’employeur Manpower assume ses choix de conduite économique de l’entreprise au travers :
- d’une démarche de Gestion Prévisionnelle de l’Emploi et des Compétences (GPEC), ce dont il s’est toujours révélé incapable en dépit des riches propositions reçues de la part notamment de la CFTC ;
- de plan de départ volontaires (PDV).
Les conséquences humaines et économiques de la gouvernance de l’entreprise ont été terribles pour les salariés : certains se sont retrouvés détruits psychologiquement, d’autres simplement privés dans le meilleur des cas de possibilités d’accompagnement pour un repositionnement professionnel serein. La CFTC n’entend ainsi pas cautionner l’irresponsabilité de la gouvernance Manpower, concernant des principes qui devraient être au cœur du métier de l’entreprise.
La CFTC va donc appuyer et illustrer par des exemples de situations réelles les conséquences des manquements de l’employeur, à l’occasion de cette procédure pénale administrative.
Voir aussi :
- notre article postérieur, sur la pétition organisée au Siège social par la CFTC pour dénoncer les procédés de restructuration dissimulée sous des licenciements abusifs soit-disant pour faute ou insuffisances professionnelles.
- notre article antérieur, sur le constat par l’administration du travail des infractions de l’employeur Manpower France à la législation sur la sauvegarde de l’emploi, et le mettant en demeure ;
- notre article antérieur, sur les errements stratégiques et organisationnels de la direction de l’entreprise ;
- notre article antérieur, sur le versement de 470.000.000 € de dividendes à l’actionnaire de Manpower France en 2010 ;
- notre article antérieur, sur la poursuite et l’accélération de la destruction massive d’emplois dans le cadre du processus de « Refondation » de Manpower France ;
- notre article antérieur, de 2009 sur les déséquilibres socio-économiques dans l’entreprise Manpower France ;
- notre article antérieur, sur l’action du CHSCT du Siège concernant la gestion des effectifs et les nouvelles règles 2009 de prise des congés ;
- notre article antérieur, sur les pressions subies par les salariés concernant les congés payés et l’édiction de règles informatiques inapplicables ;
- notre article antérieur, sur les risques psycho-sociaux importants portés par le projet de restructuration ;
- notre article antérieur, sur les chiffres de la restructuration et les manœuvres d’entrave de la direction ;
- notre article antérieur, sur l’absence d’information données aux élus pour mener la consultation sur la restructuration ;
- notre article antérieur, sur la problématique des mutations dans le réseau ;
- notre article antérieur, sur la poursuite en justice de la direction par le CCE pour entrave, suite à la mise en oeuvre sans consultation du projet de Refondation ;
- notre précédent bulletin d’information n°34 de mars 2008, qui aborde les aspects juridiques de la mobilité ;
- notre mention antérieur, sur une dégradation assumée du dialogue social par la Présidente de l’entreprise, à travers le droit de retrait d’un dirigeant sur ces questions et son limogeage condamné par les Prud’hommes.