La loi « Mathys » est au départ l’histoire triste d’un enfant de 10 ans, qui pendant quatre ans a du se battre contre un cancer du foie. Son père avait épuisé tout ses congés payés et même un congé maladie et était sans solution pour accompagner son fils. Spontanément, ses collègues, avec l’accord de la direction de l’entreprise, lui avaient fait le don de 170 jours de RTT pour lui permettre de rester au chevet de son fils jusqu’à son décès en 2009.
Les parents décidèrent de prolonger ce combat pour rendre légale cette nouvelle forme de solidarité et contactèrent leur député qui déposera un texte de loi dans ce sens. Le 9 mai 2014, la loi « Mathys » est enfin promulguée et mise en place au sein du Code du Travail sous les articles L1225-65-1 et 2.
Lors de la Négociation Annuelle Obligatoire qui s’est déroulée du 2 mars au 5 avril 2016 ont été posées les bases de l’ « Accord don de jours de repos aux salariés permanents aidant un proche malade » en date du 30 novembre 2016 signé par la CFTC.
Ce que prévoit cet accord
Tout d’abord, il faut noter que l’accord élargit l’accompagnement en l’étendant également aux parents et au conjoint du bénéficiaire du don, alors que la loi ne prévoit que l’accompagnement d’un enfant.
Le futur bénéficiaire des dons se devra d’avoir épuisé, pour faire sa demande, au moins 10 jours de Congés Payés, les 2 jours de Repos Supplémentaire, l’ensemble des Jours de Réduction du Temps de Travail acquis, épuisé son Compte Épargne Temps et déjà bénéficié des jours conventionnels pour enfant malade.
Il devra en outre s’engager à ne pas porter de jours sur son Compte Épargne Temps pendant toute la durée de la période d’accompagnement de son proche.
Ces conditions remplies, il peut faire une demande qui sera validée, avec respect du secret médical, par une commission.
À l’issue une première campagne anonyme d’appel aux dons sera ouverte auprès des salariés permanents. D’autres campagnes pourront être ouvertes par la suite, une fois les dons consommés et sous respect des limites de dons.
Le bénéficiaire ne pourra bénéficier de plus de 50 jours de dons par an de la part de ses collègues.
Les donateurs pourront faire un don à hauteur de 5 jours de congés payés acquis (y compris 1 ou 2 jours de Repos Supplémentaires) et/ou de 10 jours de repos épargnés dans le Compte Épargne Temps.
Ce don est abondé à hauteur de 10% par l’entreprise, l’abondement venant en plus du seuil de 50 jours par an.
La CFTC a décidé de signer cet accord…
La solidarité est une des bases des valeurs de la CFTC et ce texte ne pouvait pas ne pas recevoir notre aval de part son principe, en particulier au vu du contexte triste de ce texte.
Tout du long des négociations, la CFTC a œuvré afin de faire évoluer positivement ce texte en particulier :
- en faisant supprimer la clause sur l’âge maximal de l’enfant initialement prévue ;
- la non prise en compte de l’abondement de l’employeur sur le quota de 50 jours de dons ;
- le maintien intégral des droits du bénéficiaire (primes, acquisition des congés…) ;
- la possibilité de faire un don au travers de Congés Payés ET/OU du Compte Épargne Temps.
…mais regrette
- D’une part, la limitation du recueil de dons à 50 jours par an, hors abondement de l’employeur, nous demandions que ce seuil soit porté à 60 jours ;
- D’autre part, que cette solidarité soit surtout portée par les seuls salariés, l’employeur se contentant d’un timide abondement à hauteur de 10%, alors que nous demandions un abondement à hauteur de 20 % ;
- Que ne soient pas inclus dans l’accord le don de Jours de Réduction de Temps de Travail ;
- Mais surtout que ne soient pas inclus, tant du bénéfice des dons que de la possibilité de donner, nos collègues intérimaires, malgré nos demandes lors de la négociation.
Ce dernier point reste à nos yeux le plus dommageable en regard de la communauté d’intérêts qui nous lie tous que l’on soit intérimaire ou permanent.
La CFTC appelle à élargir le principe aux salariés intérimaires, en ouvrant une négociation sur la base de l’utilisation du Compte Épargne Temps Intérimaire
Une catégorie de personnel serait donc, sur la seule base de son statut, écartée de la malheureuse hypothèse de subir une situation pénible dans sa famille et même de la possibilité d’être généreuse !
Alors que l’employeur essaye de faire passer en force l’utilisation du Compte Épargne Temps pour les intérimaires, compte qui lui permet de faire fructifier sa trésorerie, il exclut la possibilité de faire utilisation de ce Compte pour des notions de difficultés familiales et de solidarité.
Encore une belle illustration du mercantilisme à court terme qui prévaut dans la tête de nos dirigeants.